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Photo du rédacteurKenan Olivier

"La Leçon du désert"

Dernière mise à jour : 21 juin

L'aventure qui m'a transformé en écrivain !

KENAN OLIVIER - Voyage à La Guajira, Colombie 2018.

La Leçon du Desert - Kenan Olivier apprend le Kite Surf à Bahia Hondita, Punta Gallinas, La Guajira.

Il y a des voyages qui vous marquent.

Celui-ci plus que tout, car il m'a transformé en écrivain.

Durant ce périple, j'ai commencé la rédaction de ma trilogie fantastique : la Guerre des Sept Lunes.

Suis-moi dans l'un des lieux les plus reculés de la planète...


14 Décembre 2018, 8 heures du matin, quelque part au nord de la Colombie. Je n’ai jamais été aussi heureux de descendre d’une voiture. Pour deux raisons, l’une spirituelle et l’autre plus terre à terre car je n’ai jamais autant prié pour arriver à bon port en un seul morceau.


Tout a commencé bien plus tôt. Cela fait cinq ans que je suis arrivé au Canada depuis la France. Je travaille six jours par semaine dans une entreprise d'espaces verts, j’ai fait deux ans de charpente et je termine ma troisième année de Manager des Opérations. C’est une belle réussite aux yeux de mes proches et de tous, mais intérieurement je suis épuisé, vidé et je ressens la boule au ventre en allant au travail.


C’est décidé, ma compagne Aleja Odyssey et moi démissionnons pour voyager pendant un an. Nous commencerons notre périple par son pays d’origine, la Colombie. Je ne le sais pas encore mais ce voyage va me transformer en profondeur.


Ce regard bienvaillant ne pas qu'attirer notre regard
Aleja Odyssey avec une femme WAYU - Le visage du désert - Kenan Olivier

Une semaine plus tôt, 7 Décembre 2018, aéroport de Bogota. Il est six heures du matin et nous terminons un voyage qui a démarré vingt-quatre heures plus tôt à Edmonton. Nous sortons de l’avion, les gens parlent espagnol, nous nous dirigeons vers le contrôle de passeports. Je suis toujours un peu anxieux avant un passage frontière. Aleja est détendue et heureuse de revenir dans son pays. Nous prenons la file des Non-Colombiens. Elle échange quelques mots avec l’agent d’immigration voisin du nôtre.

- Vous êtes Colombienne? demande-t-il.

- Oui.

- Où est-ce que vous vivez?

- Au Canada.

- Ah super.

Puis il ajoute :

- J’aurais besoin d’un petit service… Je n’ai pas le droit d’acheter au Duty Free. Mais vous, si ! Pouvez-vous acheter ce lot de trois bouteilles de Whisky pour moi ? C’est pour Noël.

- Pas de problème, répond Aleja avec un grand sourire.


Nous le suivons jusqu’aux portes de la boutique duty free, qui soit dit en passant ressemble à toutes les autres boutiques duty free du monde. Il nous tend la somme en dollars US et nous achetons son colis.

- Feliz navidad y bienvenidos a Colombia ! nous dit-il avec un sourire jusqu’aux oreilles.


J’imagine la même scène à Edmonton ou à Lyon. Je rigole intérieurement.


Nous prenons ensuite notre avion pour Riohacha, au nord de la Colombie. Le voyage se déroule sans imprévu et nous grimpons dans un taxi pour rejoindre l’Airbnb. Chaque pays a ses codes de conduite, ici ça vient de tous les côtés, à pied, sur quatre pattes, sur quatre roues, sur trois roues, et dans les interstices, sur deux roues... Le tout est savamment orchestré par une joviale symphonie de klaxons.

Un endroit qui nous permet de nous détendre
Les rues d'Uribia - Kenan Olivier

Nous passons deux jours à Riohacha pour nous acclimater à la chaleur locale car le moins devant le 30 du thermomètre au Canada s’est transformé en plus. La véritable aventure démarre lorsque nous partons pour Cabo de la Vela. Nous trouvons quelqu’un pour nous emmener dans une voiture avec climatisation, la température est de trente-cinq degrés. Nous partageons le trajet avec Valentina que nous venons de rencontrer dans la rue et Alexander qui est du coin. Cinq minutes après notre départ, il demande au chauffeur de s’arrêter pour acheter quatre Heineken et les partage avec nous.


Je suis un peu inquiet car dans mon sac à dos, j’ai deux caméras et mon laptop. Comme tout bon gringo qui débarque en Amérique du Sud, j’ai peur de me faire voler. Il n’y a pas de ceintures de sécurité et je vois des troupeaux de chèvres qui traînent sur la route, mais le chauffeur ne freine pas pour autant. Les chèvres s’écartent au dernier moment.


Alexander est un saint, sa bière est bien fraîche et je me relaxe un peu. Pendant que les autres discutent et rigolent en espagnol, je regarde le paysage désertique fait d'arbustes, de chèvres en liberté et de vendeurs de bouteilles en plastique remplies d’essence.

La piste disparaît sous les nids de poules
La piste se mélangeait avec le désert - Kenan Olivier

Deux heures plus tard, nous descendons à Uribia, la dernière ville avant le désert. Nous trouvons quelqu’un pour nous conduire à Cabo de la Vela. Nous grimpons à l’arrière d’un vieux, mais toujours très robuste, Toyota BJ75. Valentina nous accompagne et nous nous asseyons sur des banquettes le long des vitres. Nous partageons l’espace avec un générateur d’électricité de taille assez conséquente, qui sent un peu l’essence et qui saute à chaque nid-de-poule. Nous arpentons la piste, tantôt sur la piste, tantôt sur le bas-côté, tantôt à contresens, à l'appréciation de notre chauffeur qui tient le volant avec assurance, manifestement ce n’est pas son premier trajet. L’indicateur de vitesse ne fonctionne plus, la chaleur dans l’habitacle est étouffante et nous rebondissons au rythme des irrégularités de la route. Plus on avance, plus mon anxiété se transforme en enthousiasme car le paysage est féerique. On se croirait dans un vrai rallye raid ! La piste devient de moins en moins évidente, notre chauffeur nous fait la démonstration de sa science lorsque nous dépannons une famille de Colombiens de Bogota qui s’est ensablée. Il donne au conducteur une instruction précise.

- Sígame! (Suis-moi!)

Le désert rencontre la mer des Caraïbes. Plage Pilon de Azucar, La Guajira, Colombie - Kenan Olivier

Nous arrivons sans embûche juste quand le soleil se couche. Le décor est irréel, époustouflant de beauté. Les hamacs nous attendent sur la plage, sous un modeste toit en canisse, à quelques mètres à peine de l’eau. Je m’installe et je profite. L’horizon est devenu un arc-en-ciel de couleurs, du rouge au bleu nuit en passant par le violet -ce couché de soleil est resté gravé dans ma mémoire et m'a inspiré l'un des passages les plus magiques de la Guerre des Sept Lunes : l'Adakwi Lookno (la nuit durant laquelle les sept Lunes s'alignent dans le ciel et déclenchent la sécrétion de l'odelune magique sous les saules de la Forêt du Gyhr).

La belle Aleja Odyssey devant le coucher de soleil à Cabo de la Vela - Kenan Olivier

Aleja et Valentina prennent un bain rafraîchissant et bien mérité. Je prends ma caméra pour immortaliser ce moment. Valentina est très hippie et fait des mouvements de yoga. Sa silhouette gracieuse se dessine en ombre chinoise sur le couché de soleil en arrière-plan. Je filme. Les images sont dignes d’Hollywood !

Je finis par poser ma caméra et je les rejoins. Je ne m’étais pas senti aussi vivant depuis longtemps, ce lieu est si paisible... si magique.

Je fais la planche, quel panard !

Des chiens vivent dans la rue, quelques maladies de la peau et divers parasites font partie de leur vie. Mais ils sont gentils et nous protègent des “inconnus”. Enfin presque tous, une chienne embête Aleja, je m’interpose avec un NON très ferme en français. Tout rentre dans l’ordre, je me sens l’âme d’un sauveur pour quelques minutes.


Nous ne sommes que de passage sur cette terre, des poussières face à l'immensité de l'univers
Comment ne pas rester humble devant l'immensité du monde ? - Kenan Olivier

Moi qui ai grandi en Europe et ai voyagé seulement dans les pays riches, je me sens un peu bizarre dans ce coin reculé et modeste, Aleja est beaucoup plus habituée aux conditions locales. Ce voyage était l’occasion de me confronter à mes peurs et mes croyances. Je me rends compte que nous sommes assez douillets en tant que Nord-Américains ou Européens.


Une question me trotte dans la tête : comment prendre une douche ? Aleja éclate de rire et me montre avec amour comment utiliser ce petit bout de bidon en plastique découpé qui flotte dans ce gros bidon bleu rempli d’eau douce. J’apprends l’humilité, je me sens plus vivant ici avec trois T-shirts que dans mon confort habituel. Je croise également beaucoup de femmes Nord-Américaines ou Européennes qui voyagent seules, je suis admiratif de leur courage et cela me pousse à me confronter à l’inconnu. Au final, les craintes que j’avais avant de venir en Colombie ne se justifient pas et je profite de ce lieu reculé et incroyable. Nous dormons dans le hamac au son des vaguelettes et du vallenato (musique à base d’accordéon très populaire).

Le hamac au son des vaguelettes et du vallenato - Kenan Olivier

Quelques jours plus tard, nous partons au nord, à Punta Gallinas, à environ trois heures de route. Enfin plutôt de piste car le décor change et devient extrêmement désertique. Pas une seule plante ne pousse sur ce sol plat en terre craquelée. Malgré tout, quelques îlots d’irréductibles cactus survivent ici et là. Nous apercevons des montagnes à l’horizon, on se croirait sur Mars ! À l’approche de la mer, le décor se transforme en mangrove. Nous stoppons et prenons un bateau pour rejoindre l’autre côté d’un bras de mer. Les pélicans nous entourent tout le long de la traversée. Ces oiseaux ont une certaine allure avec ce bec démesuré qui sert de couloir de la mort pour leurs pauvres proies.

Chinchorro : Lieu de repos, autant pour le corps que pour l'esprit - Kenan Olivier
Une image surréaliste qui ne peut que nous impressionner et nous forcer à lever le bout du nez pour l'observer
L'horizon se paraît de ses plus belles couleurs, embrasant le ciel - Kenan Olivier - Bahia Hondita

Nous sommes maintenant à la pointe extrême nord de l’Amérique du Sud, perdus au milieu du désert. Ici mon téléphone ne vibre jamais, quel bonheur ! 


Nous passons deux nuits dans des “chinchoros” (sorte de hamac plus confortable), les ânes dorment avec nous et braient au milieu de la nuit. Je me lève et observe le ciel, je n’ai pas le souvenir d’avoir vu autant d’étoiles dans ma vie. À des centaines de kilomètres de la moindre source lumineuse, les astres ont tout le loisir de briller, et je n’en perds pas une miette. Ici au milieu du désert, je m’allonge sur le sol et laisse mon esprit voguer sans être absorbé par un courriel ou une vidéo sur Facebook. Il y a juste le silence, une brise délicieuse et les étoiles.


Je suis devenu un expert pour prendre ma douche avec le petit bidon en plastique. En faisant bien attention, nous nous douchons à deux avec un demi seau d’eau. Encore une belle leçon d’humilité, je ne prendrai plus jamais ma douche de la même façon.


Je suis même une leçon de kite surf avec un moniteur Wayu à Punta Gallinas, la pointe la plus au nord de la Colombie et du continent sud-américain, à quatre heures de piste de la ville la plus proche.

Je n'oublierai jamais cette expérience. Les membres de la famille du moniteur qui nous observent avec leurs sourires authentiques.

Je n'oublierais jamais "Bahia Hondita", la baie aux vaguelettes, ce bras de mer peuplé de flamants roses, très peu profond et toujours balayé par une brise régulière qui rend la chaleur du désert supportable.

Je n'oublierais jamais ce coucher de soleil qui baigne la plage d'une lumière d'or mystique.

Bref, je suis dans un spot de rêve et je déconnecte.


Malheureusement, il est déjà temps pour nous de repartir. Nous retournons à Cabo de la Vela et passons une nuit dans une autre auberge dans laquelle Bill Gates est venu l’année passée. Peut-être que lui aussi venait en quête de découverte intérieure ou tout simplement pour avoir une excuse pour couper un peu son téléphone.


Dunes de Taroa - La Guajira - Kenan Olivier

Nous devons déjà repartir car notre prochaine aventure dans le parc national de Tayrona nous attend. Aleja demande à un ami de nous trouver un transport pour le lendemain.

- Départ à cinq heures du matin, soyez prêts ! insiste-t-il.


Le lendemain, un vieux pick-up Ford nous attend à l'entrée de l'auberge. Le gars nous fait signe de monter dans la benne, on doit se baisser car il y a un rack métallique au-dessus de nos têtes. Nous sommes les premiers passagers, nous partageons l’espace avec des boîtes en polystyrène vides. Elles sont utilisées comme réfrigérateurs. Une fois en ville, elles sont remplies de glace et ramenées à leurs propriétaires en fin de journée.


Nous faisons le tour du village pendant que le soleil se lève, sublime encore une fois. À chaque arrêt, quelqu'un monte et une autre boîte en polystyrène est confiée en échange de dix-mille pesos colombiens (environ 2.50€). Le début du voyage se passe bien, mais je suis un peu inquiet (terrifié pour être honnête) car je me souviens du parcours emprunté une semaine plus tôt pour arriver à Cabo de la Vela. C'était du costaud. Au fur et à mesure que nous avançons, nous prenons plus de passagers, les boîtes sont transférées sur le rack métallique pour libérer de la place dans la benne. Nous sommes maintenant dix-sept adultes, trois enfants et quatre chèvres avec les pattes ficelées qui sont couchées à nos pieds. Nous faisons du cent à l’heure sur la route en gravier. Quelques passagers préfèrent s’asseoir sur les boîtes en polystyrène attachées avec une ficelle sur le toit, ou debout sur le pare-choc en se tenant au rack métallique. Le son des petits cailloux qui frappent la tôle derrière mon cou et quelques “Bêêêh” brisent la monotonie du voyage. Deux heures plus tard, nous arrivons enfin à Uribia… sains et saufs. Je n'ai jamais été aussi heureux d'arriver à destination. Après réflexion, je me dis que les gens d’ici font ça quotidiennement, j'aurais partagé leur style de vie pendant quelques jours.


Un toyota 4x4 dans le désert de la Guajira
Un décor digne de la planète Mars - Kenan Olivier

"Ce voyage m'aura permis de partager leur mode de vie et de me rendre compte que les biens matériels ne sont pas essentiels à notre vie " - Kenan Olivier

Un véhicule, dix-sept adultes, trois enfants, quatres chèvres et des boîtes de polystyrène
Plage Punta Gallinas, La Guajira, Colombie - Kenan Olivier

Depuis ce voyage, je ne suis plus le même homme. J’ai reçu une vraie leçon d’humilité. Avant, je pensais avoir besoin de toutes ces choses que j’achetais, ces vêtements de marque en trop grande quantité, ces accessoires de sport qu'on achète pour une seule utilisation... Bref, j’ai considérablement réduit mes achats matériels, et par conséquent mes dépenses. Ce qui me donne une nouvelle liberté. Je n’ai plus besoin de travailler autant pour subvenir à mes besoins matériels. J’ai redécouvert une ressource précieuse que j’avais perdue depuis cinq ans : mon temps. Je suis heureux de pouvoir ainsi voyager davantage et me consacrer à une carrière qui a beaucoup plus de sens : l’écriture.


Avec le recul, je suis très reconnaissant d'avoir fait ce voyage car ma trilogie fantastique est publiée et me permet de vivre de ma plume. Je partage enfin ce récit d'aventure, mieux vaut tard que jamais. Aleja et moi sommes devenus les heureux parents de notre petite Océane. J'ai publié les trois tomes de la Guerre des Sept Lunes, une édition intégrale comportant les trois volumes de ma trilogie et Ice le Pingouin Astronaute, un livre d'aventure pour les enfants de 3 à 6 ans.


Si jamais, tu as un projet de voyage fou en tête, n'attends pas, prépare-le et vas-y, tu y découvriras peut-être tes rêves...

Tu peux trouver La Guerre des Sept Lunes ici et t'évader dans un voyage fantastique que tu ne seras pas prêt d'oublier.


Que les lunes te protègent !


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2 Comments


Salut Kenan, content est très heureux de partager tes aventures via tes écrits. Merci de prendre le temps de t’épanouir au travers de ta plûme et d’en faire profiter les autres! Très belle plûme tu as… Que la force reste avec toi mon frère. Longue vie à toi et ta famille.

Arthur

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Merci Arthur. Tes mots me touchent ! Bises à toi et ta famille. Que les Lunes vous protègent ;-)

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